Aïte / Tori / Uke

» Posté par le 4 mars 2012 dans Notions fondamentales, Toshiro Suga | 0 commentaire

 

Commençons par le terme Aïte. Ce mot fréquemment utilisé en Aïkido est composé de deux Kanji  ou caractères chinois.

 

Le premier, « Aï », est homophone du « Aï » de l’Aïkido mais son sens est bien différent.

Pour comprendre sa signification nous allons étudier les caractères le composant.

Comme vous pouvez le voir sur le schéma ci-contre « Aï » est un Kanji lui-même composé de deux caractères distincts, ceux de l’œil et de l’arbre. L’œil représente une personne observant un arbre.

L’idée qui est transmise ici est celle de deux entités se faisant face et étant distinctes. L’idéogramme transmet donc l’idée de l’autre mais aussi celle d’opposition, d’ennemi ou d’adversaire.

 

Le second caractère « Te » est très connu. Il est utilisé dans de nombreux termes d’Aïkido tels que KataTE dori de même que dans KaraTE. Il représente la main. De même que l’œil symbolise l’humain dans sa totalité la main est elle aussi l’image d’un être dans son entièreté.

Dans toutes les cultures du monde la main a d’ailleurs un statut très particulier. Ainsi en Europe on demandait traditionnellement la MAIN de la personne que l’on souhaitait épouser. Cette main représentait alors de la même manière qu’en japonais l’être dans sa totalité.

Dans le terme Aïte que nous étudions la main prend toutefois un autre sens. Elle est le membre qui tient l’arme et représente par extension l’arme elle-même. Aïte devient alors l’adversaire armé qui nous fait face.

Le terme Aïte seul est peu utilisé au Japon et lorsqu’il est employé il est généralement associé à d’autres termes qui le précisent. On trouve ainsi par exemple Keiko-Aïte, le partenaire d’entraînement. En se popularisant le terme Aïte a perdu de sa force d’origine et est devenu graduellement le symbole d’un partenaire plus que d’un ennemi, rejoignant peut-être en cela le message de l’Aïkido…

 

Nous allons maintenant étudier les termes Tori et Uke. A leur origine se trouvent les mots Torite et Ukete qui étaient probablement plus usités lors de l’époque Meïji.

Tori est composé de deux Kanji symbolisant la main et l’oreille. Au temps des guerres féodales un guerrier était récompensé en fonction du nombre d’adversaires abattus sur le champ de bataille. Ceux-ci étaient généralement comptabilisés par le nombre d’oreilles coupées que présentait le bushi…

Le Kanji utilisé pour Tori se prononce normalement Toru et signifie prendre. Lorsqu’un Kanji est associé à un autre pour former un mot composé sa prononciation change. Toru auquel on a adjoint le caractère « Te » que nous avons vu plus haut ne se prononce plus donc ToruTe mais ToriTe simplifié en Tori à l’usage.

Uke enfin représente deux mains qui se transmettent un élément dans son intégralité, comme lorsqu’on fait passer des pièces d’une main à l’autre avec l’idée qu’il n’y a ni perte ni chute. Le terme transmet donc l’idée de recevoir.

Tori est donc celui qui « prend » le corps de l’autre et exécute la technique et Uke est celui qui « reçoit » la technique. Uke ne chute donc pas simplement et n’est pas le vaincu. Il y a une notion d’échange où, sans perte, les deux partenaires travaillent ensemble, tout autant dans le rôle de Tori que dans celui de Uke qui est trop souvent négligé.

L’étude des Kanji nous amène à redécouvrir un aspect totalement concret de notre travail et j’espère que vous y penserez la prochaine fois que vous serez Uke sur le tatami.

 

Les Kanji ont des origines parfois obscures et diverses et leurs interprétations souvent multiples et occasionnellement contradictoires font l’objet de nombreux ouvrages spécialisés. Cette rubrique les présente selon l’angle martial qui est souvent méconnu, et plus particulièrement celui lié à l’Aïkido.

 

Toshiro Suga

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